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Fujdo Rafik

Après une première halte à Sarajevo, nous prenons la route vers le sud-est et nous arrêtons à Međeđa — petit village charmant bien que sensiblement marqué par la guerre — situé à quelques kilomètres de Višegrad. C’est le hasard qui décide pour nous de cet arrêt : la nuit ne va pas tarder à tomber, un petit troquet de bord de route nous fait de l’œil, nous demandons aux habitants où nous pouvons nous garer sans gêner, trois vaillants compères nous indiquent un petit carré de terrain en contrebas, au calme et à deux pas de la rivière, l’affaire est pliée.

C’est ainsi que nous faisons la connaissance de Fujdo Rafik et de sa femme, Tania. Fujdo a soixante ans, six enfants et dix petits-enfants dont il est très fier. Il est musulman non pratiquant, d’ailleurs il nous raconte qu’une fois, il a bu trois bouteilles de Rakija — de sa délicieuse rakija « maison » — et que cette nuit-là, il a bien dormi (ça le fait encore doucement rire d’y penser). Fujdo s’est remarié avec Tania, quarante ans, après le décès de sa première femme. Il n’en parle pas mais à voir ses yeux embués lorsqu’il l’évoque, ce souvenir semble douloureux. Tania a grandit à Sarajevo, mais elle a quitté la ville pendant le siège, en 1992. Elle nous explique qu’à ce moment là, elle s’est retrouvée en France, à Paris puis à Nice, où elle a été soignée après avoir reçu une balle dans la cuisse. De retour en Bosnie, elle préfère aller s’installer au calme d’un petit village, loin de la capitale, des mauvais souvenirs, à la recherche d’une quiétude bien méritée.

Tania et Fujdo sont d’une gentillesse hors du commun ; alors que nous discutons communisme et situation de la Republika Srbska devant une bière (après avoir commenté la présence d’un portrait de Tito, fièrement installé au fond du restaurant), ils nous apportent un peu de concombre et de tomates, de l’agneau tendre à souhait, un melon, et des framboises. Pour les remercier de leur hospitalité, nous leur offrons une bouteille de vin français, que nous conservions dans un coin du camion pour ce genre d’occasion. Mais cette tentative de remerciement est un échec cuisant puisque pour nous remercier, Fujdo nous offre à son tour une bouteille, de sa savoureuse Rakija (oui, cela peut sembler étonnant d’associer « rakija » et « savoureux », mais vous n’avez pas gouté celle de Fujdo). Nous repartons vers la Serbie le lendemain matin après un bon café bosnien, en promettant à nos nouveaux amis que nous repasserons dans quelques jours.

 

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